ESCOD est un projet d’éco-sensibilisation des pêcheurs aux interactions négatives avec la mégafaune marine, et en particulier les mammifères marins.
Une journée de restitution des résultats du projet ESCOD a été organisée le 8 Juin 2023 à la Réunion par la Direction de la Mer du Sud de l’Océan Indien (DMSOI), le Comité Régional des Pêches Maritimes et de l’Environnement Marin (CRPMEM) et des chercheurs et ingénieurs IRD permanents et CDD de l’UMR MARBEC (à la suite de la restitution du projet PARADEP). Cette journée a réuni une cinquantaine de personnes des parties prenantes du système pêche réunionnais (pêcheurs, armateurs, organisations professionnelles, gestionnaires, politiques, scientifiques). Au cours de cette restitution, les résultats du projet ESCOD, qui a pris fin le 30 juin 2023, ont été présentés.
Les décideurs, scientifiques et gestionnaires ont évoqué les questions de conservation et l’intérêt d’un dispositif d’atténuation de la déprédation pour réduire à terme les habitudes des odontocètes à venir déprédater. Les pêcheurs ont aussi fait part de leur intérêt à voir développé un dispositif d’atténuation performant mais avec l’exigence que sa mise en œuvre n’entraine que peu de modifications des pratiques de pêche actuelles.
Au cours de cette restitution, outre la présentation des résultats des entretiens menés par Célya, des techniques opérationnelles de réduction de la déprédation ont été présentées : nous avons informé les pêcheurs des méthodes simples qu’ils peuvent adopter en routine au cours de leurs campagnes de pêche pour réduire les interactions avec les prédateurs et les impacts de la déprédation. Ces méthodes concernent principalement des adaptations comportementales qui ne nécessitent pas d’investissement technologique, et qui ont montré une certaine efficacité dans d’autres pêcheries. Il s’agit là aussi de leur fournir des éléments de réflexion sur des techniques opérationnelles qu’ils peuvent choisir de mettre en pratique ou non en fonction des compromis à court terme entre captures et déprédation.
Enfin, la problématique des captures accidentelles d’espèces protégées (mammifères marins, requins, oiseaux, tortues) a été abordée, et les méthodes d’atténuation des risques de bycatch ont été présentées. A la fin de la matinée de restitution, les livrets d’éco-sensibilisation sur la déprédation et les captures accidentelles ont été distribués aux professionnels présents.
Le 3 Juin 2023, la Journée de la Mer a été organisée à la Darse Foucque au Port par le ClusterMer Réunion dans le cadre du Festival de l’Océan 2023. Au cours de cette journée, plusieurs organismes et entreprises ont tenu un stand et présenté leurs activités. L’IRD a tenu un stand pour y présenter les projets PARADEP, ESCOD, et ASUR. Les posters présentés au cours de cette journée sont téléchargeables ici : PARADEP, ESCOD.
La BDRI (Bottlenose Dolphin Research Institute) a organisé la 34è Conférence annuelle de l’ECS à O Grove, Galice, en Espagne du 16 au 20 Avril 2023 (https://www.europeancetaceansociety.eu/conference/34th-annual-conference-galicia-spain). Le thème de la conférence était « Nos Océans, Notre Futur : Ecologie comportementale des mammifères marins et utilisation durable des ressources marines ». Cette conférence a rassemblé 500 scientifiques appartenant à différentes institutions et travaillant dans divers domaines relatifs à la conservation, l’écologie ou la biologie des mammifères marins dans les eaux européennes (incluant donc l’outre-mer français). Le programme a inclus 2 jours de workshops et 3 jours de sessions plénaires et de présentations de posters.
C’est dans ce cadre que notre travail dans le cadre d’ESCOD a été présenté, et plus particulièrement une partie des résultats issus de l’analyse des entretiens menés auprès des pêcheurs réunionnais à la palangre pélagique sur leur perception de la déprédation par les odontocètes. Le support de présentation était un poster présentant le contexte, la problématique et les résultats. La dernière version du dispositif PARADEP a également été présentée. Notre travail a intéressé plusieurs personnes, principalement celles impliquées dans les thèmes de la conservation.
Des échanges ont eu lieu avec des scientifiques travaillant sur les interactions négatives entre la pêche et les mammifères marins. La plupart des travaux présentés sur cette thématique concernait les captures accidentelles de mammifères marins, en particulier celles impliquant la pêche au chalut ou au filet maillant. Pour ces pêcheries, les méthodes de mitigation utilisées sont essentiellement des dispositifs acoustiques et PARADEP ne présente pas d’intérêt pour elles. Néanmoins, une équipe travaillant sur la déprédation impactant les pêcheries artisanales dans les Canaries (ligne à main, palangre, canneur) pourrait potentiellement être intéressée par PARADEP lorsqu’une version commercialisable sera disponible.
Une information intéressante est ressortie des différents échanges : la déprédation par les mammifères marins est absente de la zone Méditerranée centrale comprise entre le Portugal et l’Italie. Elle impacte surtout les pêcheries opérant dans la Méditerranée orientale (Sicile, Chypre, Grèce), la zone des Canaries, le détroit de Gibraltar ou les côtes marocaines. Par ailleurs, les principales espèces impliquées dans la déprédation sont les petits delphinidés, l’orque et le faux-orque.
Enfin, la partie Atlantique orientale bordant les côtes portugaises (notamment) sont une zone de cooccurrence des globicéphales noirs et tropicaux, et il semble que ces deux espèces ne soient pas impliquées, ou très peu, dans la déprédation (contrairement à l’Atlantique occidentale bordant les côtes brésiliennes, où le globicéphale tropical fait partie des déprédateurs des pêcheries palangrières pélagiques). Ces informations sont particulièrement intéressantes pour le projet ESCOD et la comparaison avec la déprédation impactant la pêcherie palangrière réunionnaise dans l’Océan Indien.
Notre participation à cette conférence a été l’occasion de faire connaître nos thématiques de recherche à d’autres équipes européennes, de collecter des informations sur l’occurrence de la déprédation et les espèces impliquées, et d’identifier des pêcheries qui pourraient utiliser le dispositif PARADEP.
Le poster présenté peut être téléchargé à cette adresse.
Au cours du projet ESCOD, un livret d’éco-sensibilisation aux interactions mégafaune-pêcheries palangrières a été conçu à l’intention des professionnels. Ce livret reprend différentes informations collectées auprès de diverses sources, et rassemblées dans un seul document que les professionnels peuvent prendre à bord de leur bateau. La partie Déprédation aborde différents thèmes :
- Présentation de la déprédation et des déprédateurs
- Identification des odontocètes régulièrement rencontrés par les pêcheurs (et responsables ou non de la déprédation)
- Clés d’information sur l’écologie des odontocètes déprédateurs
- Clés d’information sur la transmission de la déprédation
- Techniques de réduction des impacts de la déprédation
- Présentation de PARADEP
La partie Captures accidentelles aborde la problématique du bycatch de mégafaune protégée, des mesures d’atténuation des captures et des techniques de libération des différents groupes en cas de contact.
Le livret peut être téléchargé à cette adresse.
Dans le cadre de son stage (https://paradep.com/tests-des-dispositifs/), Célya Martial a mené des entretiens auprès de professionnels en parallèle de ses activités sur les tests de l’innovation PARADEP. Au cours de ces entretiens, elle a recueilli des variables sociologiques et elle a mené des entretiens semi-dirigés afin d’évaluer leur perception 1) de la déprédation passée et actuelle, 2) des requins et mammifères marins avec lesquels ils interagissent, sonder leurs connaissances sur la biologie et l’écologie de ces prédateurs et des enjeux de conservation dont ils font l’objet, leur ressenti subjectif sur les pertes qu’ils subissent, leurs pratiques de pêche et les méthodes qu’ils mettent en œuvre pour limiter les interactions, 3) leur avis sur l’utilisation de PARADEP.
Ce savoir des pêcheurs, malheureusement souvent sous-estimé, est pourtant précieux car il s’est construit sur des expériences de long terme, fruit d’échanges dans un réseau restreint et bien souvent inaccessibles autrement que via des interviews. Elles permettent donc d’acquérir de nouvelles connaissances sur les itinéraires, les pratiques de pêche et les stratégies des pêcheurs face à la déprédation.
Cependant, compte tenu de l’arrivée tardive des dispositifs et de la date de fin de projet, seuls 4 interviews ont pu être menés. Les données collectées durant ces interviews seront analysées avec celles d’entretiens menés au cours de précédents programmes et feront l’objet d’une publication scientifique à venir.
La mitigation des conflits pêcheries représente un défi majeur pour les scientifiques, les professionnels et les décideurs de la gestion des pêcheries.
Cependant, la difficulté de développer des solutions efficaces à la déprédation est liée à la complexité et la diversité des enjeux que ce type de conflit implique. En effet, la déprédation affecte à la fois l’Homme et l’environnement, et sa résolution nécessite une approche de recherche interdisciplinaire et reposant sur une collaboration entre scientifiques, professionnels et gestionnaires. Cette approche permet la compréhension des attitudes et perceptions de la profession vis-à-vis du conflit, et en stimulant la représentation de ses savoirs et sa collaboration avec les scientifiques, est essentielle à la mitigation.
L’objectif du projet ESCOD est de communiquer sur les conflits d’usage entre prédateurs de la mégafaune marine (requins et mammifères marins) et les activités de pêche palangrière pélagique côtière et hauturière. On se propose d’effectuer un transfert de connaissances sur les interactions négatives entre les activités de pêche et la mégafaune marine en général. On s’attachera en particulier à sensibiliser les professionnels à la déprédation par les mammifères marins et les requins. Il s’agira de vulgariser selon divers modes de communication les informations scientifiques obtenues dans la littérature sur cette problématique à l’intention du public visé par la démarche. Cela permettra de communiquer sur les mécanismes de la déprédation (indices utilisés par les prédateurs pour repérer l’engin de pêche, processus de la déprédation…). Il s’agira également de donner des clés d’identification des espèces impliquées et de diffuser des informations importantes sur l’écologie des prédateurs, et sur les mécanismes de transmission de la déprédation entre les différents individus et groupes sociaux. En ayant accès à l’ensemble de ces différentes données, les professionnels pourront mieux appréhender la déprédation et améliorer leur compréhension des processus sous-jacents à ce phénomène.
Nous communiquerons également sur les enjeux économiques, écologiques et de conservation associés à ces interactions. Nous aborderons en particulier la thématique des captures accidentelles de mammifères marins et requins, conséquence directe de la déprédation. Il s’agira notamment de sensibiliser les pêcheurs aux bonnes pratiques à mettre en œuvre en cas de capture d’une espèce protégée, pour maximiser les chances de survie de l’individu capturé.
Les trois sous-objectifs du projet sont les suivants :
– Perception du phénomène de déprédation : L’objectif de ce volet sera de recueillir le ressenti des professionnels face à la déprédation et leur donner la parole puisqu’ils sont les premiers impactés par ce conflit.
– Eco-sensibilisation à la réduction de la déprédation : Techniques opérationnelles (méthodes simples que les pêcheurs peuvent adopter en routine au cours de leurs campagnes de pêche pour réduire les interactions avec les prédateurs et les impacts de la déprédation) et protection physique des captures (enjeux du projet PARADEP et mise en œuvre en routine de l’innovation PARADEP).
– Eco-sensibilisation aux captures accidentelles de mégafaune protégée : Mesures et techniques opérationnelles pour réduire ces interactions